C’est une question qui est souvent revenue dans les interviews de femmes à succès. Elle est souvent critiquée parce qu’on ne la pose pas autant aux hommes.

Personnellement, j’ai toujours eu envie d’entendre les réponses de ces femmes même si la plupart du temps elles disent la même chose. Il faut être organisée et avoir des personnes de confiance sur qui compter. Le choix du partenaire est crucial. Comme a dit Shonda Rhimes, il faut aussi accepter que pendant qu’on excelle au travail, on manque certaines choses à la maison, et vice versa. On ne peut pas tout avoir au même moment. Ces réponses bien qu’utiles, n’adressent pas souvent les inquiétudes liées à cette aventure qu’est la maternité.

Pendant mes 3 premiers mois de grossesse, je me suis demandé comment d’autres femmes arrivaient à travailler tout en étant enceintes. On a beau dire que ce n’est pas une maladie, cet état peut être handicapant lorsqu’on fait face à des vomissements répétitifs, la fatigue, les changements d’humeur brusques, la nausée, l’incapacité de se nourrir convenablement, etc. J’ai eu la chance d’avoir des collègues et une manager compréhensifs pendant cette période. Je faisais le nécessaire pour accomplir mes tâches mais ce n’était pas toujours évident. Imaginez devoir gérer une présentation alors que vous avez envie de vous ruer aux toilettes pour vomir, après avoir senti le parfum de quelqu’un.

Elles sont nombreuses, les salariées qui ont perdu leur travail parce qu’elles étaient enceintes. Les cas de discrimination de jeunes femmes en âge de procréer continuent également d’exister. Je crois personnellement qu’il faut fournir des facilités pour qu’on n’ait pas à choisir entre devenir mère et gravir les échelons dans notre domaine. Mais en me mettant à la place des employeurs, je réalise que c’est plus facile à dire qu’à faire. On ne l’improvise pas. Il faut mettre en place une stratégie pour maintenir la continuité du travail en cas d’absence. Je parle ici du cas des mères mais cela pourrait aussi s’appliquer en cas de maladie pour un homme.

Je suis reconnaissante parce que je travaille dans un organisme international qui offre des conditions adéquates aux parents. Six mois de congés de maternité que l’on peut répartir en deux périodes et une heure d’allaitement lorsque la mère reprend le travail. Je ne craignais pas de perdre mon emploi mais même avec tous ces avantages, je me demandais quel impact cela pourrait avoir sur ma carrière professionnelle.

Qu’on le veuille ou non, devenir mère peut ralentir la progression d’une femme. De la grossesse aux premiers mois de vie de l’enfant, on « perd » au moins une année pendant lesquelles on n’est pas aussi productif qu’avant. On doit également gérer certaines séquelles liées à la grossesse et l’accouchement qui affectent aussi bien le physique que la santé mentale. On devra s’absenter parfois parce qu’un enfant est malade ou qu’il y a une réunion dans son école. Les pères font aussi face à certaines contraintes mais ce n’est pas pareil tant pour des raisons d’ordre physiologique que social. Et si l’on compte avoir plusieurs enfants, le cycle va se répéter.

Est-ce que cela veut dire qu’on ne peut pas être mère et réussir professionnellement ? Bien sûr que non. De nombreux exemples nous montrent que c’est possible. Mais on ne voit malheureusement pas l’envers du décor, les doutes et les questionnements qui peuvent animer ces femmes au sommet. On ne peut pas savoir tout ce qu’elles doivent sacrifier de chaque côté. Il est plus simple pour un homme marié et père, d’accepter une offre à l’étranger ou de retourner sur les bancs pendant quelques années que pour une femme. Je ne dis pas que c’est facile, mais le poids n’est pas le même. Le jugement de la société non plus.

Ces dernières semaines, j’ai réalisé que même six mois de congés peuvent s’avérer insuffisants face à tous les bouleversements que l’on traverse lorsqu’on devient parent. Les questions sont nombreuses. Est-ce que bébé fera ses nuits pour qu’on puisse dormir assez avant d’aller au travail ? Qui s’occupera de lui lorsqu’on ne sera pas là ? La nounou sera-t-elle digne de confiance ? Pour celles qui allaitent exclusivement, est-ce qu’on aura assez de lait pour continuer à le nourrir comme on le souhaite ? Est-ce qu’on pourra effectuer des missions et le laisser pendant plusieurs jours ?

Je sais que d’autres femmes sont passées par là et ont réussi à relever ces défis. Ça me rassure d’ailleurs sur le fait que je pourrai y arriver à mon tour in shaa Allah. Toutefois, je me suis rendu compte qu’on n’en parle pas souvent sur la place publique et qu’on n’y est confrontée que lorsque c’est notre tour. Combien de femmes ont dû quitter leur travail ou refuser une promotion pour mieux gérer leur vie de famille ? Combien d’autres ont fait face à un divorce ou des conflits avec leurs enfants parce qu’elles ont priorisé leur carrière ?

En ce moment, je regarde « Doctor Cha », une série coréenne autour de cette thématique. Le Dr. Cha est une femme dans la quarantaine qui a délaissé la médecine pendant 20 ans afin de s’occuper de ses enfants. Après une opération du foie, elle réalise qu’elle a consacré sa vie aux autres sans se soucier d’elle-même. Elle retourne travailler en tant que résidente dans un hôpital malgré son âge avancé. Elle doit faire face aux critiques de sa famille et aux difficultés que cela implique aussi au travail. C’est un bon rappel sur l’importance de ne pas s’oublier même lorsqu’on souhaite prendre soin des siens.


Au-delà les difficultés que cela comporte, je crois aussi que devenir mère peut nous donner envie de réaliser plus de choses sur le plan professionnel. Nos objectifs peuvent changer de forme. On peut opter pour un travail en tant que consultant ou entrepreneur plutôt que salarié à temps plein. On peut décider de travailler de la maison. Peu importe ce que l’on choisit de faire pour le bien de notre famille, les enfants représentent également une source de motivation. On a envie qu’ils soient fiers de nous.


Pour ma part, j’aimerais continuer à poursuivre mes rêves tout en étant présente pour mon fils in shaa Allah. J’aimerais qu’il grandisse en voyant sa mère, non pas juste comme sa maman, mais également comme une femme heureuse, accomplie et qui a un impact positif dans sa communauté.

Vous l’avez remarqué, je n’ai pas la réponse à la question posée plus haut. Je souhaite juste que les femmes qui réussissent dans leur domaine tout en menant une vie de famille, soient plus ouvertes et aident celles qui se demandent comment y arriver à leur tour.


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