« No home » de Yaa Gyasi, une perle à découvrir!

Ce matin j’ai pleuré dans le Gbaka, en direction de Grand-Bassam. Il était temps que ça sorte et je n’ai pas vraiment été surprise. Ce qui était un peu embrassant, c’était que le flot de larmes n’était pas discret et que je n’avais pas envie d’expliquer à quelqu’un que je pleurais autant à cause d’un livre. « No Home » m’a tenu compagnie pendant plus d’une semaine sans jamais me décevoir. Yaa Gyasi nous fait voyager dans le temps, tantôt sur la Côte-de-l’Or, aujourd’hui Ghana, tantôt aux États Unis. On y suit la vie d’une famille sur plusieurs générations dont les ancêtres, les demi-soeurs Effia et Esi, ne se sont pas connues. Effia a été mariée à un Anglais, capitaine du fort de Cape Coast, gardant les esclaves avant leur transfert pour l’Amérique. Esi elle, a été enlevée puis vendue comme esclave aux États Unis. Chaque chapitre relate la vie d’une nouvelle génération de part et d’autre de l’Atlantique.

« No home » est le genre de roman dont on peut deviner l’étendue des recherches qui ont contribué à son écriture. D’ailleurs à la fin du livre Yaa Gyasi cite certains des livres et articles qu’elle a consultés. Elle ne se contente pas de divertir. On a l’impression qu’elle prend la plume pour que l’histoire ne soit plus racontée que du point de vue de l’oppresseur. Elle nous amène à réfléchir, à se poser des questions sur l’impact qu’ont eu l’esclavage et la colonisation sur le peuple noir, en particulier les Ghanéens. On découvre ou redécouvre les atrocités qu’ont vécues les noirs, arrachés des leurs pour être vendus comme esclaves. On revoit les difficultés des Afro-Américains et leur lutte pour être considérés comme les égaux des blancs. Chaque génération rencontre de nouveaux défis, parfois moins difficiles que ceux de leurs prédécesseurs, mais presque toujours liés à leur couleur de peau. Des familles restent dans le cycle de la pauvreté par manque d’opportunités pour ceux considérés de couleur. Mais de l’autre côté aussi, les choses ne sont pas forcement heureuses. Ceux restés sur la terre des ancêtres doivent aussi faire face à des challenges. Pendant la période de l’esclavage, il y a cette peur constante d’être capturé par les guerriers d’un autre peuple. Et au fil des ans, les habitants de la Côte d’Or doivent ensuite lutter pour acquérir leur indépendance.


J’ai pleuré à la mort de Old Lady, Ma Akua, que certains appelaient la femme forte. J’ai pleuré pour le lien qui l’unissait à sa petite fille Marjorie mais aussi parce que je retenais déjà ces larmes depuis longtemps. Je les retenais en voyant Willie s’occuper seule de ses enfants parce que vivant dans un monde ou les couleurs ne se mélangent pas. Je les retenais parce que Graham n’a pas invité Marjorie au bal de fin d’année, parce qu’elle est née avec une peau couleur d’ébène. Je les retenais lorsqu’une femme au dessus d’Esi a uriné sur elle dans le cachot. Je les retenais pour chaque coup de fouet, chaque meurtre, chaque nouveau coup du sort qui s’acharnait tantôt aux États Unis, tantôt sur la Côte de l’Or, aux descendants d’Efia et Esi, nées de Maame.

« No home » est une perle qui n’attend que vous pour la découvrir. Et je suis sûre que vous en ressortirez satisfaits, peut-être même bouleversés. Et sinon, est-ce que vous vous souvenez du dernier livre qui vous a arraché quelques larmes? 


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