Il fait 10 mois en Argentine et deux mois au Sénégal. C’est un commerçant, et au Sénégal, il laisse deux femmes et quatre enfants. Je regarde Oumi, sa première épouse pianoter sur son téléphone. Elle a allumé la télévision pour nous tenir compagnie. Il y a une série qui y passe mais aucune de nous trois n’y comprend grand-chose. Ça aurait été tellement bien qu’elle ait des sous-titres en français. On sent bien que c’est intéressant mais on ne comprend pas le Wolof. On essaie donc de deviner ce qui se passe à partir des rares mots lâchés en français, et on en rigole comme des folles. Elle est affairée sur son téléphone à coque immense et brillante. Le salon est large, comme la télévision en son sein. On devine aisément que cette famille fait partie de celles qu’on qualifierait d’aisées dans la zone. Sans doute grâce au travail de l’époux, loin, du côté de l’Amérique Latine. On lui pose quelques questions sur la série et elle nous répond du mieux qu’elle peut, toujours avec ce charmant sourire.
Ici tout le monde est accueillant. Leurs visages resplendissent de bonté. Pas de cette bonté feinte qu’on sert parfois aux inconnus. Non, les habitants de Meckhé semblent naturellement et sincèrement bons. Moussa le fabricant de chaussures au sourire magnifique, Abo son cousin qui s’est formé en Italie pendant 5 mois pour revenir contribuer au business familial, Djily le couturier qui coud plus vite que son ombre, Fatou, la mère de 5 enfants, engagée auprès des paysans de la région et qui parcourt le monde pour parler de méthodes d’agriculture plus écolos. Eux, et tous les autres, nous ont laissé de fabuleux souvenirs, et des sourires étincelants. Ils ont chacun une histoire qui force le respect. Des histoires peut-être pas si différentes de celles qu’on entendrait si on tendait plus l’oreille autour de nous, mais ça a été des instants de pur bonheur de les écouter, et de rire avec eux, et cela même quand parfois on avait du mal à se comprendre.

En observant Oumi pianoter sur son téléphone, je me suis dit qu’elle devait être bien courageuse de vivre cette vie sans la présence physique de son époux pendant dix mois de l’année. Et encore plus en sachant que les deux mois au pays sont désormais partagés avec une coépouse. Je me suis demandé si le matériel arrivait à combler ces absences, ce partage. Et je me suis rappelée que bien que nous ayons des similarités, nous sommes le fruit de cultures et d’éducations différentes. Et la beauté des voyages se trouvent aussi dans le fait de rencontrer ces personnes au quotidien et choix de vie différents qui n’en sont sans doute pas moins heureux que nous.
Je suis reconnaissante envers Marie-Pierre pour son accueil chaleureux. Ces trois jours dans la simplicité, loin de la pollution urbaine et pleins de joie et de délicieuses nourritures, nous laisseront des souvenirs agréables indélébiles. Merci pour toutes ces belles âmes que tu nous as permis de rencontrer mais surtout de nous avoir grandement ouvert les portes de ta maison et de ton cœur.
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