« The secret lives of the four wives » de Lola Shoneyin, m’a amenée à partager l’histoire de deux personnages, en les réécrivant en français à ma façon. Je ressentais comme une urgence, un besoin irrépressible de faire connaître ces histoires au plus grand nombre. Ce roman m’a profondément touchée et je l’achèterais bien en français pour le prêter à plusieurs personnes de mon entourage.
Bolanle, jeune diplômée universitaire est devenue la quatrième épouse de Baba Segi. Sa famille ne comprend pas sa décision. Les trois autres femmes se sentent grandement menacées. Baba Segi jubile d’avoir une jeune épouse intellectuelle mais très vite il déchante. Après deux années de mariage, Bolanle n’est toujours pas enceinte. Elle refuse d’avoir recours aux médecins traditionnels et son mari décide donc de l’amener à l’hôpital. Dans la maison de Baba Segi, la première et la troisième épouse manigancent pour faire partir l’intruse coûte que coûte. En plus de susciter un complexe d’infériorité chez ses rivales, Bolanle pourrait causer leur perte si jamais leur secret venait à être découvert.
Il est très facile dès le début de deviner le secret des femmes de Baba Segi. Pourtant Lola Shoneyin arrive sans peine à nous entraîner dans ce récit dont on pourrait parfois préméditer certaines scènes. Ce que je trouve particulièrement intéressant, c’est qu’on arrive à éprouver de la sympathie pour les pires personnages du roman. Chacune des épouses a une histoire qui force la compassion. D’une certaine manière, elles ont toutes été contraintes à épouser Baba Segi. Pour se protéger du regard des autres. Pour obéir aux parents. Pour échapper à une vie de misère. Aucune d’entre elles ne s’est retrouvée dans ce foyer par amour mais parce que la société ne leur laissait pas vraiment d’alternative.

En français, « Baba Segi, ses épouses, leurs secrets », est un roman à lire par tous. Aussi bien par les femmes, que par les hommes. Lola Shoneyin présente le regard que porte la société sur les femmes qui n’ont pas d’enfants. Dans la maison de Baba Segi, de son vrai nom Ishola Alao, les femmes sont appelées par « Iya X », X étant le prénom de leur premier enfant. Le chef de famille est lui-même appelé Baba Segi en référence à sa première fille. Cela me rappelle la tradition arabe où l’on appelle généralement les hommes et femmes en référence à leur père où à leur premier enfant pour les femmes. On n’y pense peut-être pas souvent mais cela montre également la différence que l’on met entre les femmes célibataires et les mariées, les mères et celles qui n’ont pas encore donné la vie. Bon nombre de sociétés donnent l’impression qu’une femme est moins femme lorsqu’elle n’a pas d’enfant et/ou n’a pas une bague au doigt. Et c’est bien dommage!
Lola Shoneyin pointe du doigt les affres de la polygamie. C’est un monde où les épouses sont constamment sur leurs gardes. Dans la plupart des livres que j’ai lus qui traitaient du sujet, la polygamie ne semble bénéficier qu’au mari. C’était le cas dans « Xala » de Sembène Ousmane et « Une si longue lettre » de Mariama Bâ pour ne citer que ces deux là. Et même si dans « Le grand masque a menti » d’Attita Hino, Dibahou semble vivre en paix avec ses deux épouses, même là-bas la polygamie a fait des ravages. C’est peut-être possible d’y trouver des avantages, mais dans l’ensemble ce sytème familial semble causer plus de dommages aux épouses et à leurs enfants. J’ai d’ailleurs beaucoup aimé un passage vers la fin. Un conseil que donne Baba Segi à son fils Akin, pour lui recommander de ne prendre qu’une seule épouse.
« Quand tu seras en âge de te marier, prends une épouse, une seule. Et quand elle te causera du tracas, ainsi que le font toutes les femmes, souviens-toi qu’il est préférable d’avoir une seule source d’ennuis. Ecoute ce que te dit ton épouse, et ce qu’elle ne te dit pas, afin d’être prêt. Un homme doit toujours se tenir prêt. »
Vous l’avez compris, je vous recommande de lire « Baba Segi, ses épouses, leurs secrets ». En anglais, « The secret lives of the four wives » de Lola Shoneyin.
Découvrez ici l’histoire de Bolanle la quatrième épouse, et celle d’Iya Segi, la première femme de Baba Segi.
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